
Péremption du permis de construire : dans quels cas la décision doit-elle être motivée ?
I.- Le régime juridique de la péremption du permis de construire
Le Code de l’urbanisme prévoit que le permis de construire, d’aménager ou de démolir devient caduc si les travaux ne sont pas entrepris dans un délai de trois ans à compter de sa notification (article R. 424-17 du Code de l’urbanisme).
Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année.
Dans cette dernière hypothèse, le juge administratif a précisé que la prolongation de la validité du permis ne peut résulter de simples actes préparatoires ou de travaux de faible ampleur.
Seuls des travaux significatifs, traduisant un commencement d’exécution réel du projet, permettent d’interrompre le délai de caducité (CE, 21 nov. 1986, Époux Sauter-Gilli, n° 59430).
La caducité du permis de construire intervient automatiquement, sans qu’une décision expresse de l’administration ne soit nécessaire. Toutefois, dans la pratique, les maires prennent parfois des arrêtés constatant la péremption du permis de construire afin de clarifier la situation juridique. Cela permet de signifier au pétitionnaire que les travaux ne peuvent débuter ou ne peuvent se poursuivre, s’ils ont commencé.
II.- L’avis du Conseil d’État du 1er juillet 2025 : motivation et procédure contradictoire
Dans un avis du 1er juillet 2025, le Conseil d’État a précisé les règles procédurales applicables lorsque l’autorité compétente constate la péremption d’un permis de construire (CE, avis, 1er juill. 2025, SCI Les 3 Lynx, n° 502802).
L’avis apporte une distinction essentielle :
> Lorsque la péremption est constatée du seul fait de l’expiration du délai légal
Dans cette hypothèse, l’administration est en situation de compétence liée. La décision constatant la caducité n’a pas à être motivée ni à être précédée d’une procédure contradictoire. En cas de recours contre cette décision, les moyens tirés d’un défaut de motivation ou de l’absence de mise en œuvre d’une procédure contradictoire sont inopérants.
> Lorsque la péremption suppose une appréciation des faits (nature et importance des travaux entrepris)
Dans ce cas, la décision constatant la caducité constitue une décision administrative individuelle défavorable. Elle doit, d’une part, être motivée, en application de l’article L. 211-2, 5° du Code des relations entre le public et l’administration (CRPA), car elle constate une déchéance du droit à construire et, d’autre part, être précédée d’une procédure contradictoire, en application de l’article L. 121-1 CRPA, permettant au pétitionnaire de présenter ses observations.
III.- Portée pratique de l’avis
Cet avis conforte les garanties procédurales offertes aux titulaires d’autorisations d’urbanisme dans le sens où lorsque l’administration doit apprécier la réalité d’un commencement d’exécution des travaux, elle ne peut constater la péremption sans avoir, au préalable, sollicité les observations du bénéficiaire et motivé sa décision. Celui-ci peut alors, à ce stade, apporter toutes les preuves permettant de justifier du caractère substantiel des travaux déjà réalisés.
Pour les pétitionnaires, l’avis du Conseil d’État ouvre la possibilité de contester utilement une décision de caducité insuffisamment motivée ou prise sans procédure contradictoire, lorsque des travaux significatifs avaient été engagés.
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